Pendant longtemps, je n’ai plus reconnu mon corps. Plus jeune, je faisais un 36. Je posais en tant que modèle photo, j’avais un corps que j’aimais, un corps dont j’étais fière. Et puis, avec les années, les problèmes de santé, les changements hormonaux et notamment la pose d’un stérilet, ma morphologie s’est complètement transformée. En seulement 3 ans, je suis passée d’un 36 à un 42.
Dit comme ça, ce ne sont que des chiffres. Mais je peux vous dire qu’en réalité, c’était un bouleversement dans ma tête, dans mon rapport aux vêtements, et surtout dans mon rapport à moi-même. Je ne supportais plus mon propre reflet. Je fuyais les miroirs, je me noyais dans des vêtements amples. Je me sentais enfermée dans une version de moi qui ne me ressemblait pas.
Et puis, il y a quelques mois, on m’a retiré mon stérilet. Je n’avais pas d’attente particulière, mais très vite, je me suis sentie moins gonflée, plus légère. Je respirais mieux dans mes vêtements. Mais je n’ai jamais pensé une seule seconde que j’avais réellement perdu du poids. Jusqu’aux essayages de robes de mariée…
J’essayais des robes supposée être à ma taille , et… elles étaient toutes trop grandes. Toutes! Il a donc fallu que je reprenne mes mensurations, histoire de comprendre. Et là, le choc total : j’avais perdu plus de deux tailles et demie en seulement quelques mois !!
Je ne m’en étais même pas rendu compte ! Je n’avais absolument pas l’impression d’avoir minci ! Pourtant, les signes étaient là : Plusieurs personnes m’avaient dit que j’avais l’air d’avoir minci, mes pantalons glissaient un peu trop, mes vêtements tombaient différemment… Mais je n’avais rien voulu voir ! J’étais persuadée que mon corps n’avait pas changé. Et c’est fou, mais parfois, on peut vivre dans un décalage total entre notre image réelle et l’image que notre esprit a figée.
Je crois que c’est ce qui m’a le plus frappée : on peut avoir une perception tellement faussée de soi-même qu’on ne voit même plus la réalité. Le jour où j’ai pris mes mensurations, c’est comme si quelque chose s’était réaligné dans ma tête. Je me suis regardée dans le miroir, vraiment regardée, et j’ai enfin vu la femme que je suis aujourd’hui.
Ce déclic m’a redonné confiance. Je ne veux pas dire que tout va bien d’un coup, ni que le rapport à son corps se règle en une prise de mensurations. Mais ce moment a été un point de bascule. J’avais besoin d’un repère concret pour réapprendre à me voir comme je suis, avec bienveillance, sans déformation mentale.
On parle souvent de perception du corps, d’image déformée. Il existe même un terme précis : la dysmorphie corporelle. C’est ce décalage entre ce que le miroir renvoie et ce que notre esprit croit voir. Et c’est fou comme ce mécanisme peut nous enfermer dans une version de nous-même qui n’existe plus.
Je recommence à apprécier mon corps, non pas parce qu’il “rentre dans une taille”, mais parce qu’il m’appartient et qu’il évolue avec moi. Et si tu lis ces lignes et que toi aussi tu as l’impression de ne plus reconnaître ton reflet, sache une chose : tu n’es pas seule, et parfois, il suffit d’un petit déclic pour se reconnecter à soi.


